#faitenplastique

Charlyne Réhel —

À l'aube de son grand départ, Émilie L. Laberge s'apprête à prendre part à un long voyage d'une durée de plus de 8 mois à bord du « Expedition Drenched », un voilier vert qui se veut être un organisme à but non lucratif, créé par un couple d’américains passionnés par les océans. Elle y découvrira les îles du sud du Pacifique avec 9 presque inconnus avec comme mission de conscientiser les gens sur l'environnement que ce soit par le nettoyage de plages, conférences sur l’environnement, assister les groupes environnementaux locaux sur des projets de recherche sur le Dugong (animal marin menacé d’extinction) et lors de la ponte d’œufs de tortues marines, ect. 


Particulièrement inspirante avec sa volonté de faire une différence en éduquant la population sur la protection de l'environnement et de nos océans, nous avons demandé à Émilie de nous parler de sa vision du plastique et des actions concrètes que nous pouvons poser dans notre quotidien afin de faire notre part. 


Son histoire 
En 2017, débutait pour moi le projet de partir voyager 6 mois en Asie du Sud-Est. J’ai vendu ma maison et pratiquement tous mes meubles. Je suis partie vivre chez une amie avec rien de plus que mes effets personnels pendant une année. Puis est venu le départ en 2018, je suis partie avec 35L qui tenait dans un sac, équipement de plongée inclus. J’étais déjà allée en Asie, mais d’y passer 6 mois, m’a fait réaliser l’ampleur du problème du plastique. Il y est partout. Oubliez les belles photos sur Instagram, juste à côté se trouve assurément une grappe de déchets qui a élu domicile sur nos terres et océans pour plusieurs centaines d’années, n’ayant souvent servi que quelques minutes.

En Amérique du Nord, le problème du plastique y est encore plus important puisque l’on en consomme plus par individu et on nous apprend faussement que pour être écologique il suffit de le recycler. Le plastique est donc moins visible dans nos rues et espaces verts parce qu’il est ramassé pour être recyclé (en partie seulement) et envoyé par bateau principalement en Chine, pour y être transformé en objet de consommation qu’on nous retourne ensuite par bateau. Des allers-retours pas très payants pour nos océans. La Chine a cessé récemment d’accueillir nos déchets de plastique. Recycler ne suffit plus en 2019 pour être écologique. 


Et le plastique dans tout ça?
Sur l’île de Flores, en Indonésie, avec la mondialisation est récemment apparue le plastique à usage unique. Avant, ses habitants (comme plusieurs autres dans cette région du globe) utilisaient la feuille de banane pour emballer leur nourriture. Lorsqu’ils avaient terminé avec, ils la laissaient au sol. Le plastique est arrivé tellement rapidement dans leurs vies, qu’aucun changement ne s’est fait sur la façon de disposer de leurs emballages. J’ai sillonné cette île de fond en comble et dans les villages où les touristes ne mettent pas les pieds, le sol, les fossés, les champs, les cours d’eau sont recouverts de plastique. Nous faisons de mieux qu’eux que de le ramasser, c’est assez peu pour un pays dit développé. Qu’advient-il selon vous de notre plastique maintenant que la Chine n’en veut plus et que les autres pays d’Asie emboitent le pas un à un? Le recycler coute très cher en énergie et n’est pas rentable. Donc maintenant, votre emballage de plastique, croyez-vous toujours qu’il sera à coup sûr recyclé et transformé? 

Partout dans les médias, sur les réseaux sociaux on parle du problème, mais, qu’attendons-nous pour agir? Si nous en sommes conscients, pourquoi ne modifions-nous pas drastiquement nos habitudes? Revenons à nos bases, nos racines ; s’approvisionner comme nos grands-parents le faisaient, avoir des contenants consignés pour le lait (et lait de noix) par exemple, acheter en vrac, ne pas surconsommer, réparer nos vêtements, acheter les légumes locaux de saison et ne pas acheter de produits transformés. La terre et notre santé s’en porteraient beaucoup mieux.

Vous avez probablement entendu parler des « 3 R » ; réduire, réutiliser et recycler. Pour moi, ils sont en ordre d’importance. Il faut agir rapidement et collectivement. Réduire c’est de s’en tenir à l’essentiel. Le fameux « En avez-vous vraiment de besoin? » de Pierre-Yves McSween, l’appliquer dans toutes les sphères de notre vie. C’est revoir ses choix de consommation. C’est de se demander si on ne pourrait pas emprunter à un proche, ou utiliser un service de location plutôt que d’acheter. Sinon, tenter d’acheter de seconde main d’abord, ensuite le plus localement possible et se questionner sur les matériaux utilisés, y aller pour le choix d’un produit durable, qui va bien traverser les années et les modes (combien de chandails à « juste » 5$ ou 20$ avez-vous portés qu’une seule fois?) et choisir des produits multifonctionnels pour éviter la surconsommation.

Réutiliser c’est de se départir des choses dont on ne se sert plus, pour permettre à d’autres de les utiliser. C’est de se donner la peine de réparer un objet plutôt que de le jeter. C’est de donner une seconde vie à des objets ou des matériaux, avant d’en consommer de nouveaux. Chaque jour, nous sommes appelés à faire des choix de consommation. Du café du matin, au repas pour emporter, à la bouteille d’eau et au cocktail avec 4 pailles. Tous ces choix nous le faisons sans réfléchir, comme si c’était normal d’utiliser autant de plastique à usage unique.  

Je suis revenu d’Asie en juillet 2018. Ne voulant pas retourner dans mon ancien mode de vie, dans une maison trop grande pour une personne et qui me privait de ma liberté nouvellement acquise, je suis allée vivre chez une amie qui partait en voyage pour l’été en attendant de trouver un lieu qui me ressemblait. Puis je suis retournée vivre chez l’amie qui m’avait hébergé l’année d’avant. N’ayant pas de « chez-moi » pour accumuler des effets personnels, je m’en suis passée. Je ne me suis jamais sentie aussi libre et vivante. Depuis janvier 2017 je vis avec 75% de mon salaire. C’est un programme que j’ai la chance d’avoir avec mon employeur qui me permet de partir en voyage tout en gardant un salaire et un lien d’emploi. On me demande régulièrement comment je fais pour « arriver ». La réponse est simple, je consomme très peu et j’ai fait le choix d’avoir « moins » de confort. Il faut aussi dire que j’ai de la chance d’avoir dans mon entourage des amies qui, comme moi, croient à l’économie de partage et qui m’ont laissées leurs demeures lorsqu’elles les habitaient peu, parfois en échange de services rendus sur l’entretien de la maison. Pour adhérer au principe de l’économie de partage, il faut ouvrir ses horizons, faire confiance aux gens et ne pas avoir peur de déranger. Je crois que c’est une solution essentielle pour le bien-être de notre planète qui est visiblement malade. 

Ce projet nourrit ma soif de découvrir le monde, mais aussi mes valeurs environnementales et de vie en communauté. Nous visons le zéro déchet à bord, achèterons notre nourriture en vrac, mangerons végétarien, la coupe menstruelle est obligatoire, nous avons une quantité limitée d’eau douce, elle sera donc utilisée consciemment et tenterons de naviguer autant que possible à voile.


Comment pouvons-nous faire notre part en voyage?
- Aucune boisson ou repas pour emporter. En bonus ça permet de prendre le temps de relaxer et manger consciemment.

- Apporter ustensiles et pailles lavables dans son sac avec soi tous les jours.

- Apprendre dans la langue locale les mots « plastique », « emballage » et « paille » par exemple pour s’assurer de ne pas s’en faire servir. (Je vous conseille également bonjour, merci, et pas épicé svp!)

- Toujours traîner sa bouteille d’eau réutilisable. Pour les destinations où l’eau du robinet n’est pas potable, il existe plusieurs solutions; pastille, goutte, filtre au charbon et technologie à l’osmose.

- Minimiser ses transports en avion.

- Si vous voulez rapporter des souvenirs, choisissez quelque chose d’utile et fabriqué localement à la main.


Communauté June, vous qui choisissez des maillots faits à Montréal, à partir de matériaux recyclés et durables, merci de nous aider à protéger nos océans en faisant ces choix consciencieux et n’hésitez pas à promouvoir ce type de décision dans votre entourage. N’ayez pas peur d’être des pionnières et de sensibiliser vos proches, mais aussi vos commerces de quartier. Comme consommateurs, acheter c’est notre façon de « voter » tous les jours.

Suivez leur aventure sur la chaine Youtube ici et sur Instagram ici.  

Par Émilie L.Laberge